Robert Bober et Jean-Claude Grumberg, histoire d’une amitié

Paru le : 23.05.2024

Ce film est né d’un entretien entre Robert Bober et Jean-Claude Grumberg, réunis par Mémoires à l’œuvre le 9 juillet 2023 à la librairie Millepages de Vincennes. Au fil d’une conversation chaleureuse et pleine de vie se dessinent les fondements de leur amitié, nourrie par une sensibilité commune. En confrontant leurs souvenirs des rencontres, des lieux et des événements qui les ont marqués, ces deux passeurs de mémoire nous livrent un témoignage, aussi émouvant qu’éclairant, sur leur rapport à la littérature, à l’art et à la culture yiddish. Ce dialogue perlé d’humour, en six mouvements (une histoire d’amitié ; les secrets de la création ; la culture et la langue yiddish ; la Shoah ; la transmission ; lectures croisées), constitue une véritable traversée du XXe siècle et nous offre une belle réflexion sur le genre humain.

Notes explicatives :

Lorsque Jean-Claude Grumberg évoque les « Gryner » (« vert » en yiddish), il parle des Juifs d’Europe de l’Est qui, ne voulant plus vivre là où leur famille et leurs proches avaient été exterminés, sont venus en France après 1945. Ce mot était déjà employé par ceux qui avaient immigré avant la Seconde Guerre mondiale (l’historienne Sabine Zeitoun leur consacre un ouvrage publié en 2021 aux éditions Le Manuscrit : https://lemanuscrit.fr/livres/les-gryner/).

Le « travelling avant », auquel fait allusion Jean-Claude Grumberg, correspond au mouvement de caméra opéré par le réalisateur italien Gillo Pontecorvo dans un plan de son film Kapo, sorti en Italie en 1960, dont l’action se situait dans un camp de concentration. Dans un article intitulé « De l’abjection », paru dans le numéro 120 des Cahiers du cinéma en juin 1961, Jacques Rivette a formulé un jugement sans concession à propos de ce choix qui esthétisait un cadavre: « Voyez cependant, dans Kapo, le plan où Riva se suicide, en se jetant sur les barbelés électrifiés : l’homme qui décide, à ce moment, de faire un travelling avant pour recadrer le cadavre en contre-plongée, en prenant soin d’inscrire exactement la main levée dans un angle de son cadrage final, cet homme n’a droit qu’au plus profond mépris. » Pour une étude des enjeux et incidences de cet article de Rivette, on pourra lire, dans la rubrique « Ouverture pédagogique », la première partie de l’article d’Anne Faurie-Herbert « Le Fils de Saul de László Nemes – Un conte cinématographique peut-il briser l’interdit ? » : https://www.memoires-en-jeu.com/pedagogie/le-fils-de-saul-de-laszlo-nemes-un-conte-cinematographique-peut-il-briser-linterdit/