Deux grands témoins du Goulag, deux oeuvres qui, tout en se réclamant l’une comme l’autre de la modernité littéraire, s’opposent sur le plan esthétique. L’un privilégie le roman, l’autre l’antiroman. L’un vise la forme monumentale avec L’Archipel du Goulag , l’autre la forme brève avec Les Récits de la Kolyma . La première est mondialement connue, la réception de la seconde, internationale aussi, n’a pas dépassé les cercles de « lecteurs exigeants » ou académiques. Le premier est perçu comme étant de droite, alors que sa première publication en France a été saluée par les communistes, le second comme appartenant à la gauche trotskiste, alors qu’il a rompu avec le trotskisme dès le début des années trente. Il s’agit surtout de deux regards différents sur l’expérience du Goulag et le témoignage. École absolument négative de la vie pour Chalamov, les camps de travail soviétiques offriraient, selon Soljenitsyne, une possibilité de rédemption personnelle. Deux conceptions différentes de l’écriture aussi.